Les témoignages des habitants

Ces hommes très différents des soldats que l'on pouvait voir sur les routes furent très remarqus par la population. Leur habitude  de se déplacer en colonnes par deux, d'une démarche raide ponctuée simplement par les ordres de leurs officiers, parfois en nage sous un soleil de plomb, ne puvait que les faire remarquer.

Leur tenue vestimentaire, en particulier leurs pantalons beaucoup trop grands dont le fond leur arrivait aux genoux, excitait des remarques peu flatteuses. Par d'autres sources, nous savons que ces malheureux n'avaient droit qu'à  un uniforme de cérémonie et quelques affaires légéres comme vêtements. L'attaché naval japonais à  Lorient négocia avec l'intendance allemandes la fourniture de vêtements et obtint des uniformes ... anglais, "trouvés" en 1940 dans des entrepôts.

L'arrivée de leur colonne dans le stade de foot, un dimanche, et leur soutien enthousiaste à  l'équipe de Châteauneuf en laissa plus d'un sans voix.
Ils reçurent une allocation qui leur parut royale en  monnaie d'occupation . 
S'ensuivirent quelques situations cocasses:

    Un habitant de Saint Goazec se souvient que les enfants, d'habitude friands des quelques bonbons distribués par les soldats « n'aimaient pas ceux que donnaient ces hommes là , mais ma mère m'a renvoyé en prendre.. »     Le mystère trouve peut être son explication dans les souvenirs d'une épicière de Châteauneuf :  Trois de ces hommes entrèrent dans sa boutique et lui montrèrent un papier sur lequel tait écrit « Bonbon » 
Les bonbons, cela faisait belle lurette qu'elle ne pouvait plus s'en procurer qu'occasionnellement, tout allait aux Allemands !     Elle pointa donc son doigt vers la rangée de bocaux vides avec un geste qui voulait clairement dire « Plus rien ! »  Il y eut un bref échange entre les hommes, et l'un d'eux attrapa d'un geste autoritaire un bocal plein de petites choses emballées dans du papier  rouge et jaune, en saisit une, l'ouvrit, la goûta.  Nouvel échange et le chef jeta des gros billets sur le comptoir, prit sa monnaie et répartit le butin entre les hommes.  L'épicière, heureusement, avait une petite réserve de bouillons Kub, sinon sa clientèle lui aurait fait des histoires, en ces temps où tout manquait..
 
L'un d'entre eux vit, à  la devanture de l'horloger, des réveils en métal brillant, de ces gros réveils à  double cloche. Emerveilé, il s'aperçut que son viatique lui permettait d'acheter cet objet luxueux.  Bientôt, devant les villageois ébahis, le trottoir devant l'horlogerie Jezequel fut encombré de matelots hilares qui faisait sonner  chacun leur réveil, comparant les sonneries, toute discipline et raideur oubliées.